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Le Maroc décroche les droits télé pour la CAN 2008 et la Coupe du monde 2010 |
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En contrepartie de ces droits, la chaîne ART dispose de la retransmission gratuite des matches du championnat national et d’une mise à disposition des moyens de la SNRT. La SNRT versera 225 MDH sur trois ans à la Fédération nationale de football pour l’acquisition des droits télé du championnat national et des matches de l’équipe nationale.
Qui aurait dit que les trébuchements dans la programmation du championnat de 1re division allaient déboucher sur une aussi heureuse issue ? En se substituant à la chaîne arabe ART dans le paiement des recettes que cette dernière devait verser, et obtenant, en contrepartie, la retransmission terrestre des droits télé pour la CAN 2008, la Coupe du monde 2010, la Ligue africaine des champions et un match hebdomadaire du championnat français, la Société nationale de radiodiffusion et télévision (SNRT) réalise assurément un gros deal. Certes, elle s’acquittera de quelque 225 MDH sur trois ans, mais la manne publicitaire attendue par la diffusion de ces matches vaut bien le débours.
Dans cette opération tripartite, tout le monde ou presque est gagnant, à commencer par la Fédération royale marocaine de football (FRMF) à laquelle les droits de retransmission des matches rapportaient jusqu’ici peu ou prou. Vendredi 12 octobre a été signé à Rabat le contrat de droits TV le plus important de l’histoire du football national. Couvrant trois saisons de championnat, il porte sur la retransmission en direct par les trois chaînes de la SNRT de tous les matches de la première division du championnat du Groupement national de football (GNF) et des rencontres des équipes nationales. La Fédération royale marocaine de football percevra sur ces trois années la bagatelle de 225 MDH. La première année, la SNRT versera dans les caisses de l’instance fédérale 70 MDH, 75 millions la seconde année et 80 millions lors de la troisième. C’est sous la houlette de la Primature que ce contrat a été préparé depuis plusieurs mois, en toute discrétion. Contactés par La Vie éco, aussi bien les responsables du bureau fédéral que ceux de la SNRT ont refusé de faire des commentaires à ce sujet.
2M et Al Oula, grandes perdantes du contrat, ne retransmettront qu’un match chacune
La grande gagnante de ce contrat n’est autre qu’Arriadya, chaîne sportive du pôle public qui émet sur le satellite et en numérique terrestre (TNT). La chaîne retransmettra en direct quatre rencontres de première division sur le satellite et deux sur le bouquet TNT de la Snrt. Les deux autres chaînes, 2M et Al Oula en l’occurrence, retransmettront chacune une rencontre en direct. La chaîne sportive pourra également retransmettre en différé la totalité des rencontres du championnat tout au long de la semaine. La programmation de chaque journée de championnat de GNF 1 est organisée en fonction de cette grille. Ce faisant, les compétitions hebdomadaires commenceront dès vendredi pour se terminer le dimanche avec un match en soirée.
Les deux autres chaînes du pôle public devront donc se contenter chacune d’une rencontre en direct. «Ce sont les plus grands perdants de ce contrat», fait remarquer un fin connaisseur du football national. En effet, depuis de nombreuses années, les rencontres du championnat national étaient retransmises par la TVM, la seule qui existait à l’époque, sans qu’aucun contrat ne la lie à la fédération. A la fin des années 90, 2M, flairant le bon filon que pourrait représenter le championnat de football, s’est également mise sur les rangs. Mais c’était compter sans la pression de la TVM. Finalement, la chaîne de Aïn Sebaâ s’en est sortie avec un contrat de retransmission des rencontres qui se jouaient à Casablanca, au complexe sportif Mohammed V. Ces deux contrats, avec la TVM et 2 M, ne rapportaient plus de 10 MDH au championnat national. «Ce contrat a posé durant de nombreuses années des problèmes à la première chaîne qui a vu la retransmission de son championnat amputée de prestigieuses rencontres du Wydad et du Raja quand ces deux clubs jouaient à domicile», explique une source au sein du bureau fédéral sous couvert d’anonymat. La tension entre les deux chaînes atteignait son paroxysme à l’occasion du classique derby casablancais.
Quand ART change la donne du championnat national
La situation va changer avec l’explosion du foot-business suite à la qualification du Maroc à la finale de la Coupe d’Afrique des nations qui a été organisée en Tunisie en 2004. La signature d’un contrat-programme avec le gouvernement de Driss Jettou, d’un montant de 280 MDH en vue de professionnaliser la pratique footballistique nationale en juin 2005, a augmenté la pression sur les membres fédéraux pour faire aboutir le dossier des droits de retransmission télévisuelle du championnat national. La fédération, forte de ses nouveaux conseils en marketing sportif, demande une renégociation des contrats. Chose qui a été faite début 2006, année durant laquelle l’instance fédérale a réussi à faire augmenter les recettes de ces retransmissions de 30 MDH pour les deux chaînes, pour atteindre 40 millions (Arriadya se joindra au peloton après sa création courant 2006 sans bourse délier). Soread-2M réglait en argent comptant alors qu’Al Oula réglait en espace publicitaire. Et pourtant, cette année-là , le football national n’était pas au top de sa forme : le parcours des Lions de l’Atlas lors de la CAN organisée en Egypte a été des plus désastreux et le championnat national décevant. En outre, la réalisation du contrat-programme n’avançait pas, ce qui a poussé de nombreux observateurs à douter de l’aboutissement de ce chantier de professionnalisation. Les différentes démissions qui ont marqué cette période, notamment celle du secrétaire général de la fédération, Ahmed Ammor, considéré comme l’initiateur de ce projet, a fini par noircir le décor. Mais le foot marocain reste tout de même vendeur...
Une année après la signature de son contrat, ART n’a payé que le tiers de ce qu’elle devait à la FRMF
Le rebondissement allait survenir cette même année 2006. Cheikh Salah Kamel, PDG du groupe ART, sent à son tour le bon filon que représente le football marocain. Dans une position confortable puisque détenant les droits TV de la Coupe d’Afrique et du Mondial jusqu’en 2010, il entame des négociations avec l’instance fédérale. Le bouquet arabe a offert dans un premier temps 120 MDH pour une exclusivité de droits sur trois années du championnat national avant de ramener son offre à 60 MDH, en cas de partage des droits avec les chaînes du pôle audiovisuel public. Beaucoup de voix se sont élevées à l’époque pour dénoncer le chantage fait au football national par un groupe étranger. Le contrat sera finalement signé en décembre 2006 avec un montant de 27 millions de dollars (près de 220 MDH) sur cinq années. «C’est un contrat hybride que personne n’a compris au moment de sa signature», fait remarquer un ancien membre fédéral.
La fédération se retrouvait finalement avec deux contrats de retransmission TV la liant à plusieurs chaînes. Arryadia retransmettait chaque week-end quatre matches et rediffusait les huit matches en différé durant la semaine, ART Network deux matches, alors que 2M et Al Oula se contentaient, chacune, d’un match en direct par journée de compétition. Très vite, le richissime homme d’affaires saoudien allait découvrir que le marché national n’était pas une aussi bonne affaire. «Il aurait beaucoup plus qu’il ne devait en gagner», souligne un observateur de la scène sportive nationale. Différentes erreurs de programmation vont accentuer cet état de fait. «Quand on connaît la programmation qu’est la nôtre, on comprend mal comment un bouquet de chaînes payant comme ART arrive à programmer correctement des matches de notre championnat», précise un ancien membre fédéral.
En plus de la programmation chaotique, un autre événement va générer une profonde divergence. Il s’agit d’un derby WAC et Raja comptant pour la saison 2006-2007. Alors que le bouquet exigeait l’exclusivité pour l’une de ses chaînes, Al Oula a fait valoir le droit des contribuables à regarder un match aussi important sur leur chaîne publique nationale. La FRMF a également été de cet avis, ce qui a été loin de plaire aux dirigeants d’ART. Résultats : ces derniers n’ont versé aux caisses de la fédération que 30 % de ce qu’ils devaient verser initialement (5,4 millions de dollars/an) arguant des erreurs de programmation et d’exécution du contrat. «Ils étaient tout à fait en droit de refuser le paiement total des droits TV puisqu’ils ne pouvaient programmer un match sans qu’un imprévu de dernière minute ne perturbe cette programmation», souligne un expert en marketing sportif.
Championnat contre Coupe d’Afrique, Mondial et championnats étrangers
A la fin de la saison dernière, Younès Alami, directeur de la chaîne sportive relevant du pôle public, entame des négociations avec Cheikh Salah Kamel. Il s’en est suivi un contrat de partenariat signé et non rendu public, en août dernier à Cannes, entre Arriadiya et Art.
Par ce contrat, les chaînes publiques mettent à la disposition du bouquet arabe leurs moyens techniques pour la retransmission en direct de deux rencontres du championnat des GNF (auparavant, ART était obligé de recourir à ses propres moyens techniques). «C’est exactement ce que stipulait son contrat précédent avec la fédération, sauf que le bouquet arabe ne débourse plus rien», souligne cette source au sein d’Arryadia.
En contrepartie, ART offrira à la SNRT la diffusion terrestre des rencontres de la Coupe d’Afrique des nations qui aura lieu au Ghana en 2008 ainsi que celles de la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud. En outre, la chaîne sportive marocaine a acquis la possibilité de diffuser une rencontre du championnat français de première division ainsi que les matches de la Ligue africaine des champions, dont le bouquet ART détient les droits. «Tout ceci s’inscrit dans une logique gagnant-gagnant entre les différentes chaînes», précise cette même source. Mais c’est surtout la fédération et les clubs du GNF qui profiteront le plus des retombées financières. «Cette somme (225 MDH) constitue une bonne partie de ce que la fédération devait lever comme fonds propres pour suivre l’exécution du contrat-programme la liant au gouvernement», souligne un ancien membre fédéral qui a requis l’anonymat. Après le chantier de la mise à niveau des infrastructures en les équipant de gazon artificiel, et celui de construction de centres de formation, le chantier des droits TV est ainsi bouclé, offrant une belle somme à la fédération. Ses dirigeants sauront-ils seulement comment s’en servir ?
Source : Fadoua Ghannam | La Vie Eco |
24/10/2007 |
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