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Plaidoyer pour le développement touristique du Tafilalet |
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Grande région originale, le Tafilalet a,pour tous les historiens, la particularité d’une position naturelle isolée du reste du Maroc par le Haut Atlas. En franchissant le col de Talrhemt (La chamelle) 2900m, le visiteur venu du Nord a l’impression de franchir un seuil, ou entre dans l’intimité d’un nouveau monde celui des oasis et du désert.
Cette vaste région entre le Sahara et l’Atlas est un espace considéré toujours comme un monde à part, son trait le plus marquant est sans doute le contraste entre le chapelet verdoyant que forment les oasis le long des vallées et l’immense no man’s land constitué de montagnes et de plateaux dénudés.
Selon une étude réalisée par le CRT Meknès-Tafilalet, Les oasis qui s’inscrivent dans ce territoire se présentent comme des couloirs de vie tendus entre les deux alignements montagneux du Haut Atlas Oriental au Nord et des chaînons de l’Anti Atlas au Sud . Par leur localisation, leur structure et leur continentalité, elles ne ressemblent exactement à aucun autre espace oasien du pays, l’on est en présence d’oasis de tailles diverses, juxtaposées le long de cours d’eau situés dans les seuls bassins versants endoréiques du pays(Ziz, Rhris et Guir).
Par la semi aridité de leur cadre géographique(50 à 300mm/an), la diversité de leurs paysages et leur mise en valeur économique, elles rappellent cependant la vallée de Dra à laquelle elles s’apparentent par la participation à trois ensembles géographiques différents mais mitoyens et complémentaires à savoir le Haut Atlas, le sillon présaharien et le domaine primaire antiatlasique.
Toutefois , les oasis du Grand Tafilalet (Province d’Errachidia) sont cinq fois plus vastes que celle du Dra, et ont une position franchement plus continental .En effet , compte tenu de la proximité du Haut Atlas et de la densité de son réseau hydrographique, la province d’Errachidia contient les oasis les plus étendus du Maroc, voire d’Afrique du Nord , elles s’alignent le long de trois grandes vallées : Ziz, Rhris, Guir et de leurs affluents haut atlasiques et antiatlassiques.
Dans ces oasis, où les terres agricoles sont limitées, vit une population de prés de 600.000habitants dont 75% sont des ruraux et vivent principalement de l’agriculture.
Le Tafilalet est un haut lieu de l’Histoire du Maroc, aussi bien sur le plan politique que sur le plan ethnoculturel. En effet , de par sa position remarquable à la porte du Sahara , il a été longtemps une véritable plaque tournante entre l’Afrique noire et l’Afrique du nord d’une part et entre le Machrek et le Maghreb d’autre part. Sur le plan socio cultuel, il a joué un grand rôle dans la pénétration de la civilisation arabo-islamique en Afrique du nord-ouest, il a été aussi la base de départ des mouvements de tribus au Maroc vers les régions côtières tout au long de son histoire.
Cette partie du pays considérée par les historiens comme le cœur historique et géographique de l’ensemble du présahara marocain, apparaît comme un vaste pays où différents éléments ethniques (imazighènes, arabes, populations noires) venus s’y installer depuis de nombreux siècles, sont arrivés très lentement à se fondre. Un bloc massif de population au caractère viril, parlant le tamazight ou l’arabe, chacun de ces groupes possède ses propres coutumes et ses particularités vestimentaires distinctes, mais cette diversité est de pur forme, car fondamentalement la région est une mêlée à des nuances locales, ce peuple présente de nombreux traits communs ; ils sont tous travailleurs et hospitaliers, ils ont tous le même esprit de curiosité détaché et critique, la même attitude tolérante et philosophe envers la vie et ses problèmes.
Située dans l’une des régions les plus anciennement humanisées du Maroc, le Tafilalet fut, de longue date, associé en partie aux grandes civilisations qui marquèrent l’histoire du Maroc. Elles y laissèrent des vestiges importants : tumulus funéraires,Zaouias,marabouts,ksours et surtout la grande cité de Sijilmassa qui fut un centre d’attraction et d’action religieuse et dont l’histoire se devine plus qu’elle ne peut s’écrire. C’est l’une des premières villes fondées à l’époque islamique au Maroc. Elle aurait été fondée, selon certaines sources, au VIII ème siècle avec le règne des Zénètes( royaume des Béni Midar) bien après le départ des romains du Maroc.
Toujours est-il que c’est une ville qui a prospéré au Moyen Age pour devenir un véritable « port du désert » et une plaque incontournable du commerce saharien. Les écrits historiques sur Sijilmassa ainsi que ses vestiges, malgré le peu qu’il en reste, témoignent de l’importance de cette cité, importance que l’on reconnaît également aux monnaies qui sortaient de ses ateliers.
Cette ville qui aurait abrité jusqu’à 100.000 habitants fut pendant des siècles l’une des villes les plus importantes du pays, avant de devenir à la fin du XVI ème siècle le principal relais caravanier avec l’Afrique noire, l’Europe et le Moyen Orient.
Sijilmassa, c’est également le berceau de la dynastie alaouite. Le mausolée de Moulay Ali Chérif, ancêtre et fondateur de la dynastie est situé à Rissani, son architecture arabo-musulmane fait de lui l’un des grands monuments historiques du Maroc.
Ces éléments font du Tafilalet un pole d’attraction touristique par excellence, dépaysement, paysage féerique, ciel particulièrement lumineux propice une forme durable d’écotourisme où la mythologie de la montagne et les aventures pittoresques ne peuvent que drainer plus de visiteurs si une stratégie de promotion adéquate a été mise en œuvre pour faire connaître ce produit touristique hors normes.
Merzouga a l’énorme avantage de se vendre pratiquement toute seule, mais l’attrait irrésistible de Erg Chebbi ne peut dispenser les professionnels d’une opération marketing de grande envergure pour entraîner toute la région de Meknès-Tafilalet dans une dynamique de développement touristique susceptible de faire de notre région un vrai pole touristique.
Mais le Tafilalet, structuré autour de la ville d’Errachidia, est un ensemble spatio-économique qui présente l’image d’un paradoxe saisissant. Des potentialités et des atouts certains mais aussi des contraintes et des défis qui nous imposent une vision claire, une stratégie réfléchie et surtout une approche multisectorielle.
En effet, la province d’Errachidia occupe 80% de l’espace régional, mais seulement 25% de la population au niveau de la région. Ce déséquilibre interpelle surtout que tous les efforts consentis par les pouvoirs publiques au niveau de l’électrification, de l’approvisionnement en eau potable et du désenclavement n’ont pu fixer la population.130.000 habitants en moins selon le dernier recensement.
Berceau de la dynastie Alaouite, la province d’Errachidia dispose d’un grand potentiel touristique vue la diversité des données naturelles, la richesse de de son patrimoine historique et culturel et l’authenticité de ses traditions ancestrales. Considéré comme le plus grand oasis du Maroc, il conserve encore l’héritage de l’ancienne Sijilmassa fondée au VIII° siècle et qui fut la capitale commerciale et culturelle du pays situé entre l’Afrique noire, l’Afrique du Nord
L’Europe et l’Orient .La palmeraie du Ziz qui s’étent sur plus de 150 km est un patrimoine universel, les kasbahs n’ont rien à envier à celles de Ouarzazat , les dunes de sables de Merzouga, à 40 Km de Rissani sont mondialement connus pour la beauté du site et certaines vertus thérapeutiques et les ksours , comme ksar El Fida qui abrité le festival de la musique du désert, sont d’une valeur inestimable.
Par ailleurs les conditions pédo-climatiques de la zone agro-écologique de Tafilalet font de cet espace l’un des réservoirs du palmier dattier les plus riches dans le monde.
Le Tafilalet abrite aussi les principaux gisements miniers de la région. Si le secteur présente plusieurs atouts dont la valorisation est susceptible de lui assurer une vraie relance, il reste handicapé par un monopole de l’Etat qui ne facilite pas son émergence.
Force est de reconnaître que les pouvoirs publics ont consentis de grands efforts en équipement. Un programme énorme de désenclavement de la province vers Ouarzazate, Beni Mellal, Meknès et Oujda en aménageant et en élargissant des routes a été réalisé, l’Aéroport Moulay Ali Cherif est fonctionnel malgré certaines contraintes, le taux d’électrification rurale est de 94 % , soit le meilleur sur le plan national, et celui de l’approvisionnement en eau potable est de 84%. Pourtant ces efforts n’ont pas pu endiguer la problématique de l’exode rural qui risque d’accentuer la désertification de cette zone tout en posant plusieurs problèmes dans la périphérie des villes, notamment Meknès.
Pour une province qui possède 444 km de frontières avec l’Algérie, les défis sont énormes et demandent l’implication de tout le monde pour les relever.
Le méga concert de Michel Jarre, le festival des musiques du desert et d’autres initiatives louables des amoureux du desert ont certes permis de dépasser la vision classique d’espace de désolation et de déclencher certaines dynamiques, mais ces actions n’ont pu produire un changement qui s’inscrit dans la durée et qui puisse assurer leur perrenisation et un apact conséquent sur le développement socio-culturel de la région.
Il faudrait donc pour le Tafilalet, un engagement volontariste des pouvoirs publics pour accompagner l’effort consenti par la province dernièrement dans le cadre de l’Initiative Nationale pour le Développement Humain ( INDH) afin de relever les défis et fixer une population, fière d’ailleurs de sa région, dans ses ksours.
Source : Hassan BENMAHMOUD | L'opinion |
12/08/2007 |
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