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La galère des étudiants loin de chez eux



Il est de notoriété publique que la vie estudiantine rime rarement avec aisance financière, qui plus
est lorsque l’étudiant poursuit ses études dans une ville autre que celle de ses parents.



Chaque année, des milliers de bacheliers entrent à l’université en vue de poursuivre un cursus supérieur. Presque autant quittent leurs régions pour commencer une nouvelle vie scolaire, loin des leurs. Ils doivent se séparer de leurs parents et de leur milieu pour s’installer dans des villes dotées d’une université, une école ou un institut supérieur. Et, dans bien de cas, s’accoutumer à une vie pas toujours aisée. Car, étudier loin de sa ville de résidence et de surcroît de ses parents, n’est pas une simple sinécure.

MR est originaire de Marrakech, ville où réside sa famille. Elle a choisi de vivre à Rabat, sa nouvelle ville de résidence, pour y suivre une formation à l’ISIC. Comme nombre de ses camarades, on lui a accordé une place au campus. Les contraintes liées à l’éloignement de ses parents, elle les vit tous les jours.
«Pendant que les camarades de classe se consacrent à leurs cours, révisent leurs leçons, je dois, par exemple, préparer à manger, faire le ménage, la lessive.

Car, quand bien même je vis dans un campus, je dois prendre soin de tout. Parce qu’il n’y a pas un parent pour le faire à votre place», raconte-t-elle. Un travail au quotidien auquel vient se greffer la solitude occasionnée par l’absence des siens. «A la fin de la journée, on a généralement envie de raconter sa journée à un frère ou une sœur. Mais dans ce cas, c’est le vide complet. Il n’y a aucun parent avec qui discuter. Et rien que cette idée vous déconcerte», constate-t-elle.

Mounir dépeint son séjour d’études sans complaisance. Il a choisi de suivre son cursus à Casablanca pour, dit-il, améliorer ses chances de décrocher un travail lorsqu’il aura fini ses études. «C’est difficile de suivre des études universitaires dans une ville d’affaires comme Casablanca.

Ce n’est pas toujours évident surtout quand on vit éloigné des parents et que l’on vient d’une petite ville. Le coût des loyers est exorbitant. Comme on a très peu de moyens, on est obligé de trouver une chambre dans un quartier populaire. Aussi, se déplacer à Casablanca coûte cher», confie-t-il.
Comme nombre de ses camarades de la région d’Errachidia, Mohamed T. a connu cette galère.

Nous sommes en 1990. Errachidia, comme la plupart des régions reculées de l’époque, n’a pas d’université. Les étudiants désireux de poursuivre un cursus supérieur doivent se résoudre à quitter leur région et migrer vers celles qui en disposent. Dans le cas de M. T, c’est l’université Mohamed Benabdellah de Fès qu’il a choisie pour y suivre ses études de Droit.

Aussitôt arrivé, il prend conscience de sa situation. Explication :«A cette époque, je percevais une bourse trimestrielle d’environ 1624 dh que je répartissais pour l’achat de la nourriture, de vêtements et le loyer. La chambre revenait à 450 dh par mois et par personne. Et parce que je n’avais pas d’autres ressources, il fallait trouver une place dans un quartier populaire avec tout ce que cela comporte comme ambiance. Je devais partager un petit appartement à sept et quelque fois à dix. Il fallait s’entasser pour réduire les coûts du loyer», se souvient-il.

«Comme nous étions très éloignés de chez nous, et faute de moyens, nous ne pouvions voir nos parents qu’une fois par trimestre. Et le pire, c’est que nous n’avions pas droit aux loisirs (aller au cinéma, stade…) du fait que nous étions constamment fauchés. Sur le plan scolaire, il fallait débourser un peu d’argent pour espérer acquérir un livre de droit en français», raconte-t-il. Grâce à la solidarité des uns et des autres, M. T parvint à achever ses études.

Aguerrie par des conditions de vie strictes, S.L, étudiante estime que: «Suivre ses études, loin des parents, forge la personnalité de l’étudiant. Il se sent apte à vivre d’autres aventures. Dans ce sens que l’étudiant peut prétendre à l’avenir vivre seul sans que l’absence des siens lui pose véritablement problème. On finit par s’y faire. On apprend à se prendre en charge, et dans bien de cas à cuisiner».

Un avis que partage sous un autre angle Mounir : «L’université pour un jeune qui vient de la campagne est une forme de liberté vis-à-vis de la famille et de la société d’où il vient. Aussi, vivre loin des siens permet dans une certaine mesure de se concentrer sur ses études», conclut-il.

Source : ALAIN BOUITHY | Libération
26/01/2007

 

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